Qu’adviendra-t-il de vos biens virtuels à votre décès?
Certains d’entre vous se sont-ils déjà posé la question suivante: à mon décès, mes comptes de messageries, réseaux sociaux et stockage en ligne de données me survivront-ils ad vitam æternam?
Cette question est maintenant rendue cruciale lorsque vous souhaitez planifier votre testament. Votre patrimoine virtuel est composé de tous ces comptes que vous possédez sur le web et il est d’une importance capitale de prévoir ce qu’il adviendra de ces comptes à votre décès.
Tout dépendamment de votre activité sur la toile, chacun d’entre vous aura un besoin spécifique en regard à ce patrimoine virtuel. Souhaitez-vous que vos comptes Facebook, Twitter, Gmail, etc. soient fermés rapidement suivant votre décès, ou bien souhaiteriez-vous que l’un de vos comptes reste ouvert à titre commémoratif?
Bien des solutions pourront s’offrir à vous en ce qui concerne la planification de votre testament. Il faudra tout d’abord s’assurer de dresser un inventaire complet de votre patrimoine virtuel, ainsi que d’avoir en mains chacune des politiques d’utilisation de vos comptes. À ce stade, votre notaire pourra plus aisément vous conseiller en regard des politiques d’utilisation de chacun de vos comptes.
La première solution sera de transmettre les identifiants et mots de passe à votre liquidateur, mais comme ces informations ne sont pas fixées dans le béton et sont sujettes à changement il faudra penser à informer votre liquidateur de tout changement.
La deuxième option qui s’offre à vous serait de prévoir une transmission de l’accès à vos comptes par testament en prévoyant la transmission et la distribution des biens virtuels ou encore en autorisant de façon large l’accès aux comptes par le liquidateur, en espérant que ces clauses générales seront facilement opposables à un fournisseur de services ou utilisables par lui. Un fournisseur de services localisé dans un pays étranger, qui ne connaît probablement
pas notre langue et ignore la teneur de notre droit fera bien peu de cas d’une telle clause si elle ne correspond pas à la politique qu’il applique et qu’il affiche dans ses conditions d’utilisation. C’est pourquoi chacun de vos biens virtuels devrait faire l’objet d’un examen attentif en regard de ses politiques d’utilisations.
La troisième et dernière possibilité sera d’avoir recours à des sites de dépôt « sécurisés » dans une voûte virtuelle. En effet, certains sites web offrent maintenant des services de consignation sécuritaire de vos identifiants et mots de passe, tout en assurant leur transmission aux personnes désignées lors de votre décès. D’entrée de jeu cette solution semble être la plus adaptée, mais elle a également ses limites. En effet, puisqu’un tiers fournisseur de service est ici employé afin de gérer et de transmettre vos identifiants il faut se questionner sur la viabilité à long terme du fournisseur d’un tel service, particulièrement en considérant la courte durée de vie des entreprises œuvrant dans les nouvelles technologies. La solution du dépôt des identifiants dans une telle « voûte » virtuelle n’en est donc pas une, et risque même d’apporter au principal intéressé un faux sentiment de sécurité qui pourrait avoir une issue désastreuse.
Bien qu’aucune solution ne soit parfaite, j’espère avoir suscité un questionnement pour chacun d’entre vous! Votre présence sur le web est appelée à grandir et il faut toujours avoir en tête que ce ne sont pas tous les sites web ou réseaux sociaux qui adoptent les mêmes politiques quant à la fermeture d’un compte après votre décès.
Source: PATRIMOINE VIRTUEL ET PLANIFICATION TESTAMENTAIRE, Par Me Bertrand Salvas, publié dans répertoire de droits, Chambre des Notaires, août 2014.